En Suisse voisine - Mars 2024

"L'eau ignore les frontières", la troisième infolettre de la fondation suisse FEDRE

La fondation suisse FEDRE (Fondation européenne pour le développement durable des régions) a partagé sa troisième infolettre :

 

INFOLETTRE – FRONTIÈRE
Numéro 3 : janvier-février 2024

L’eau ignore les frontières

Créée à Genève en 1996 dans l’orbite du Conseil de l’Europe, la FEDRE s’intéresse depuis toujours aux régions transfrontalières. En 2023, elle a noué un partenariat avec le Crédit Agricole next bank pour étudier l’effet-frontière sur le pourtour de la Suisse dans divers domaines, dont certains échappent à l’attention du grand public. Après le numéro 1 qui traitait de l’aide alimentaire, le numéro 2 qui abordait les difficultés du secteur de la santé dans certaines zones frontalières de la Suisse, voici le numéro 3 qui aborde un sujet proprement vital pour nos régions : l’eau.

Tout comme le temps qui passe, l’eau coule sans se préoccuper des hommes – et encore moins des frontières que ceux-ci ont tracées ! Dans le monde contemporain, l’eau potable devient une ressource de plus en plus rare. C’est un enjeu majeur du XXIe siècle. Car sans elle, pas de vie. Et que seraient nos régions alpines ou jurassiennes sans les lacs et les cours d’eau, fleuves, rivières ou torrents qui les irriguent et font intimement partie de notre environnement immédiat, presqu’autant que l’air, et de notre imaginaire le plus intime ? D’évidence, « l’eau accueille toutes les images de la pureté », comme l’écrivait le philosophe Gaston Bachelard dans L’eau et les rêves

La notion incontournable de « bassin versant »

Dans les régions de montagne qui sont les nôtres, l’eau ne connaît qu’une logique : non pas celle de frontière, mais celle de « bassin versant ». On s’en aperçoit de façon frappante lorsqu’on rend visite à la Commission internationale de protection des eaux du Léman (CIPEL https://www.cipel.org/), organisation franco-suisse créée en 1963 pour surveiller et améliorer la qualité de l’eau du lac, le plus grand d’Europe occidentale.

En réalité, l’aire d’intervention de la CIPEL couvre pas moins de 10'000 km2, pas seulement le lac lui-même mais, jusqu’à leur source, tous les cours d’eau et leurs affluents qui viennent s’y jeter et pourraient le polluer, ce qui comprend les territoires du Valais (où le Rhône a sa source), du canton de Vaud, du Chablais en Haute-Savoie et d’une partie de Fribourg. Par ailleurs, la frontière traverse le lac, dont les trois quarts de la surface relèvent de la Suisse et le quart restant de la France, les deux pays étant représentés de manière paritaire dans la CIPEL

Lorsque la CIPEL fut créée, la situation du lac était préoccupante du fait des rejets polluants, notamment chimiques, des collectivités et industries installées sur le bassin versant. Mais ses recommandations ont été suivies d’effets, produisant la généralisation de stations d’épuration un peu partout. Toutefois, il faut garder un œil sur les taux de micropolluants et de microplastiques.

Aujourd’hui, les deux principales menaces qui pèsent sur le Léman sont liées à la diminution du brassage de l’eau et à la prolifération de la moule quagga. L’eau fait l’objet d’un brassage naturel, les couches supérieures riches en oxygène s’alourdissant en hiver pour se mélanger aux couches inférieures riches en nutriments. Mais depuis une douzaine d’années, on constate qu’à cause des changements climatiques, le brassage s’effectue moins bien et que les fonds n’ont plus assez d’oxygène. De plus s’est installée une moule quagga dont on pense que vers 2045, elle aura entièrement tapissé le fond du lac. Or, elle peut filtrer jusqu’à 1 litre par jour, dévorant de l’intérieur l’eau du lac par pompage de ses nutriments, ce pourquoi celle-ci semble parfois étonnamment claire ! On n’a hélas pas de remède contre cette prolifération, et les efforts faits aujourd’hui visent essentiellement à empêcher que d’autres lacs soient eux aussi contaminés.

En recherche de solutions innovantes : le Cluster Eau Lémanique Évian

Ce pôle associatif https://clustereau.fr/ créé en 2019 à Évian, ville mondialement connue pour son eau minérale alpine, favorise l’innovation et la mise en réseau en accompagnant le montage de projets reposant sur l’intelligence collective à l’échelle du bassin versant du Léman. Son activité s’organise autour de quatre axes, considérés comme « stratégiques » : l’optimisation et la gestion durable des usages de l’eau, la préservation de la biodiversité des milieux aquatiques, l’utilisation des végétaux pour la gestion des cours d’eau et la réhabilitation des milieux dégradés, l’eau comme facteur de production d’énergie dans un but de décarbonation.

Il s’agit de l’eau sous toutes ses formes : potable, minérale, lacs et marais, neige, eaux thermales, eaux superficielles et souterraines.

Parmi les réalisations spectaculaires, citons un laboratoire créé en partenariat avec l’Agence spatiale européenne étudiant, grâce aux images par satellite y compris thermiques et infrarouges, les eaux superficielles du bassin versant lémanique.

Macro-région : l’ensemble des Alpes

C’est le périmètre transfrontalier le plus ambitieux. La SUERA (EUSALP en anglais https://alpine-region.eu/) rassemble sept pays alpins – l’Allemagne, l’Italie, la France, la Suisse, l’Autriche, la Slovénie et le Liechtenstein – pour conduire des projets financés par l’Union européenne à l’échelle de ce que cette dernière considère comme une « macro-région » descendant au sud jusqu’à la Méditerranée où se jette le Rhône, et remontant au nord jusqu’à la Bavière et la Haute-Autriche.

Après la France en 2020-21, l’Italie en 2022, la Suisse en 2023, la Slovénie préside en 2024 cette instance dont le secrétariat est à Nice, et qui a développé un « groupe d’action », co-présidé par la Convention alpine et le Land autrichien de Carinthie, dont l’objectif est de « préserver et valoriser à l’échelle du massif alpin les ressources naturelles, y compris l’eau ainsi que les ressources culturelles ».

Avec l’économie circulaire et la mobilité, l’eau a été un des trois thèmes transversaux sur lesquels la présidence suisse a particulièrement mis l’accent en 2023.

 

SOURCE : https://www.fedre.org/cooperation-europeenne/effet-frontiere-fr/leau-ignore-les-frontieres/

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